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Dernière actualisation: février 2013
6 janvier 2013
Nouvelles promesses américaines de réglementer la spéculation financière: seront-elles traduites dans les faits?
Lors d’un discours la vice-présidente de la Fed (Réserve fédérale des Etats-Unis) a indiqué que son pays voulait "aussi vite que possible" pour réformer le marché des produits dérivés s'échangeant de gré à gré ("over the counter" ou OTC en anglais). Elle a notamment fait référence aux engagements pris lors du sommet des pays du G20 en 2009 et qui devaient être suivis d’effet avant la fin de l’année 2012, mais qui du fait de «difficultés» rencontrées n’ont pas pu encore être respectés.
Rappelons ici que depuis les années 70 de nouveaux dispositifs sont apparus sur les marchés tels que les produits dérivés du commerce des marchandises, notamment les contrats à terme et les options. Ces instruments financiers dont la valeur dépend de l’évolution des prix des marchandises et de leur volatilité sont cotés sur les marchés et permettent de spéculer sur les changements des prix des produits à plus ou moins long terme. Le volume concerné par les dérivés sur les marchés financiers peut concerner plusieurs fois le volume réel de produits échangés sur le marché physique. Ils ont connu une véritable explosion au cours des ans avec le développement des capitaux financiers (fonds de pension notamment) et les taux d’intérêts bas. Ils représentaient en 2011 plus de 700.000 milliards de dollars, à comparer aux 18.000 milliards de dollars d’exportations mondiales et au 60.000 milliards de dollars de PIB mondial. Les produits dérivés ont été mis en cause pour expliquer l’instabilité de certains marchés comme les marchés des produits agricoles lors de la flambée des prix alimentaires en 2007-2008.
L’effet réel de la spéculation financière dans l’instabilité et la hausse des prix alimentaires reste sujet à polémique. Deux thèses s’opposent : celle qui considère que les opérateurs non commerciaux ont été attirés par des prix qui augmentaient pour d’autres raisons (thèse défendue notamment par le FMI), et celle qui considère que les marchés financiers sont l’une des causes de la hausse des prix.
Une nouvelle pièce à rajouter au dossier est un travail mené en 2011 par des chercheurs du New England Complex Systems Institute (NECSI), à Cambridge, aux Etats-Unis, et qui a abouti à la construction d’un modèle qui reproduit fidèlement l’évolution récente des prix agricoles. Ce modèle accorde à la spéculation et à la production d’éthanol la responsabilité conjointe majeure dans la crise alimentaire traversée depuis 2007. Le rapport des chercheurs américains concluait à l’urgence d’une réglementation des marchés financiers et à une modification de la politique de soutien à la production d’agro-carburants à partir du maïs.
Il sera intéressant de voir si la réglementation promise par la vice-présidente de la Fed verra vraiment le jour et dans quels délais elle sera effectivement appliquée, puis de voir quel sera ses effets sur les marchés des produits alimentaires et agricoles d’une façon plus générale.
Sur la financiarisation des marchés, voir le Rapport sur le commerce et le développement, 2011 de la CNUCED http://unctad.org/fr/Docs/tdr2011_fr.pdf vers la page160
Consulter l’étude du NECSI (en anglais) The Food Crises: A quantitative model of food prices including speculators and ethanol conversion
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