Nouvelles
22 février 2016
Pour produire davantage: s’allier à la nature au lieu de la combattre
Il y a deux façons radicalement différentes de considérer le monde (le Weltanschauung de Kant et Hegel) et de définir notre relation avec lui :
•La première, qui a totalement dominé notre pensée au cours des siècles les plus récents, est une manière qui nous voit comme des individus luttant pour notre survie dans un environnement hostile
•La seconde, qui a regagné du terrain au cours de ces dernières années, est une manière qui nous voit pleinement intégrés dans notre environnement et dépendant de lui pour une vie saine et durable.
La première de ces deux visions, qui a sous-tendu tant la pensée que la pratique « occidentale », nous a amené à un mode de vie « stérilisé » et l’utilisation massive d’antibiotiques dans le domaine médical afin de nous protéger des agressions de micro-organismes malfaisants ; elle a aussi été le fondement du développement d’une agriculture qui cherche à éradiquer toutes les maladies et les ravageurs grâce à un recours généralisé aux pesticides et fongicides.
La seconde de ces deux perspectives est chaque jour renforcée par de nombreuses découvertes scientifiques qui montrent que nous ne pouvons survivre que si nous vivons dans une relation symbiotique avec les milliards de micro-organismes qui jouent un rôle fondamental non seulement dans notre capacité d’assimilation de la nourriture, de gestion de notre immunité et de réduction de nos allergies, mais aussi même dans notre humeur, oui, notre humeur. Dans cette façon de voir le monde, nous faisons partie intégrante de l’environnement dans lequel nous vivons, et notre vie dépend de comment nous arrivons à créer des relations symbiotiques « gagnant-gagnant » avec tous les organismes avec qui nous le partageons. C’est là une conception adoptée depuis des siècles par les Bouddhistes et bien des peuples « indigènes »…
Et c’est aussi vrai pour les plantes. On sait depuis longtemps que les légumineuses sont capables de fixer l’azote de l’air seulement parce qu’elles vivent dans une relation symbiotique avec une bactérie, le Rhizobium. Mais c’est aussi vrai d’une façon bien plus générale comme cela a été prouvé par la science qui a montré que les milliards de micro-organismes qui vivent autour des racines des plantes jouent un rôle essentiel dans la migration des nutriments du sol vers la plante.
Les implications de ces découvertes sont que, plus nous stérilisons nos sols en y déversant des produits chimiques [lire], moins les plantes que nous cultivons bénéficient de l’aide de tous ces micro-organismes utiles. Il est donc grand temps de reconsidérer notre façon de gérer les plantes et de repenser notre agriculture…
Nous avons déjà parlé ici de comment, en encourageant la relation symbiotique entre des plantes et un champignon trouvé dans les eaux chaudes du Parc National de Yellowstone, il est possible d’augmenter la capacité de résistance à la sécheresse de ces plantes, notamment le maïs, et comment cela a été utilisé par la startup Adaptive Symbiotic Technologies basée à Seattle [lire].
Et voilà que Indigo Agriculture, une entreprise basée à Cambridge dans le Massachussetts, cherche à mobiliser « la nature pour aider les paysans à nourrir durablement la planète” » en travaillant avec « les microbes qui ont évolué avec les plantes pendant des millions d’années, afin d’optimiser la santé de celles-ci et maximiser leur productivité ».
Doté d’un budget de plus de 56 millions de dollars, Indigo Agriculture veut réintroduire les microbes qui ont été perdus du fait de l’utilisation de technologies agricoles « modernes ». Pour cela, plutôt que d’enrober les semences avec des produits chimiques comme cela est fait couramment dans l’agriculture « moderne », Indigo Agriculture veut les enrober de microbes « amis ». Les essais réalisés par Indigo Agriculture ont montré une augmentation de 10% des rendements et on estime ainsi que cette technique pourrait entrainer d’énormes augmentations de production pour les cultures sur lesquelles l’entreprise a travaillé (coton, blé, soja et maïs).
Pour nous, à lafaimexpliquee.org, ce sont des bonnes nouvelles qui vont certainement dans la bonne direction, celle d’une agriculture écologique qui utilise des processus naturels.
Mais pour que cela puisse aider à éliminer la faim dans le monde, il y a une condition qui doit être remplie : c’est que la technique ainsi développée soit disponible pour les paysans pauvres à un prix réellement modeste.
Alors, quelles sont les intentions de Indigo Agriculture à cet égard ?
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Pour en savoir davantage :
-Le site Web de Indigo Agriculture’s : http://www.indigoag.com (en anglais uniquement)
-Kowitt, B., This Startup Wants to Use Bacteria to Revolutionize How Our Food Is Produced, Fortune, February 2016 (en anglais)
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Dernière actualisation: février 2016