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21 décembre 2014



Royaume Uni : une étude montre l’échec du système alimentaire britannique


La New Economics Foundation (NEF), un centre de réflexion et d'action basé à Londres, a publié un rapport sur le système alimentaire britannique en novembre dernier sous le titre: « Rappel urgent : notre système alimentaire en cours d’examen » (Urgent recall: Our food system under review).


Partant de quelques questions fondamentales telles que : « Un système alimentaire, pour quoi ? Est-ce simplement pour nourrir la population en augmentant continuellement la production ? Est-ce pour garantir la subsistance et la santé publique ? Devrait-il renforcer les environnements locaux ? », NEF a décidé d’examiner le système alimentaire britannique, qui, si l’on s’en tient aux objectifs typiques fixés au système agricole et alimentaire à la fin de la Seconde guerre mondiale (« plus de production alimentaire, des prix alimentaires plus bas, moins de mauvaise santé liée à des déficiences alimentaires »), a toutes les caractéristiques d’un succès.




Le personnel de la NEF a mené des interviews, a analysé les résultats de recherches et les données disponibles, et, sur la base des résultats ainsi obtenus, a élaboré une suite d’indicateurs afin de mesurer le réel degré de ‘succès’ du système alimentaire britannique face à ce qu’un système alimentaire devrait réellement faire en ce 21e sècle. Dans les mots du rapport de la NEF :


  1. « Avoir un impact environnemental neutre ou positif

  2. Être productif dans son utilisation de l’énergie et d’autres intrants

  3. Être diversifié en espèces et en gènes

  4. Offrir de bons emplois

  5. Être dominé par des filières courtes et simples

  6. Être fait d’actifs contrôlés par un ensemble ouvert de parties prenantes multiples

  7. Renforcer une culture alimentaire positive et florissante

  8. Mettre à disposition une nourriture abordable par tous ».


Le résultats des recherches menées par la NEF montrent que le système alimentaire britannique ne respecte guère ces objectifs : l’obésité et les maladies liées à l’alimentation se répandent et tuent un nombre croissant de personnes, les terres agricoles sont dégradées et le système est l’un des principaux agents du changement climatique. Voilà qui n’est certes rien de neuf pour les lecteurs réguliers de lafaimexpliquee.org, mais cette étude a le mérite d’offrir des preuves claires et quantifiées pour étayer cette opinion :


  1. Le coût environnemental du système alimentaire britannique peut être estimé entre 5.7 et 7.2 milliards de livres sterling (entre 7,3 et 9,2 milliards d’euros) par an, sans compter le coût en perte en biodiversité, érosion des sols et pollution des eaux par les industries alimentaires. Cela représente environ entre 6,3 t 7,9 de la valeur marchande de la nourriture.

  2. Le système est très inefficace du point de vue énergétique : il consomme huit calories pour en apporter une seule (soit un rendement d’à peine 12,5%)

  3. Tout comme le système alimentaire mondial, le système britannique dépend d’un nombre limité d’espèces, de races et de variétés : au Royaume Uni, 76% des races d’animaux d’élevage sont en risque de disparition, du fait d’un élevage de plus en plus homogène

  4. La majorité des travailleurs du système alimentaire se trouvent dans le commerce de détails et les services - serveurs ou serveuses, cuisiniers ou cuisinières et caissiers ou caissières de supermarchés - et ils/elles ont un salaire très bas comparé à la moyenne des salaire au Royaume Uni

  5. La terre est aux mains d’une très petite minorité (0,25% de la population) et son prix augmente très vite (multiplié par plus de 3 entre 2004 et 2013)

  6. En moyenne, les ménages britanniques utilisent moins de 10% de leur budget pour l’alimentation

  7. 10% des fermes agricoles ne sont pas rentables, même après subventions

  8. La distribution des heures de travail force les ménages à optimiser leur temps et choisir la restauration rapide et les plats préparés.


Ces faits suffisent, selon le rapport, pour demander une action immédiate. Comme dans beaucoup d’autres secteurs, le secteur alimentaire est devenu un secteur économique très concentré, orienté vers la production de profit et qui ne se préoccupe guère du bien-être des populations ou la protection de notre environnement. Mais le rapport affirme qu’il est possible de changer cette situation en s’inspirant notamment de quelques cas de succès qu’il passe en revue. A cette fin, le rapport propose quatre principales étapes qu’il s’agira de suivre :


  1. Reconnaitre la vraie valeur de ce que nous attendons de notre système alimentaire

  2. Développer et utiliser de nouveaux outils et paramètres pour mesurer si ces attentes sont réalisées

  3. Etablir un mouvement démocratique pour soutenir les changements qu’il faut apporter à notre système alimentaire

  4. Changer les politiques, réglementation et l’organisation institutionnelle afin de créer les conditions qui orienteront notre système alimentaire vers la réalisation de nos attentes. Dans le cas de l’Union européenne, des changements devront être apportés à la Politique agricole commune, mais plus largement, plus de réglementation est requise sur la publicité pour les produits alimentaire ou la spéculation financière sur les produits alimentaires.


Il est fort probable que le diagnostic et les recommandations faites dans ce rapport s’appliquent dans un grand nombre de pays, surtout, mais pas seulement, parmi les pays riches, et même au niveau mondial. Les preuves apportées corroborent les conclusions d’études antérieures sur l’énorme coût de notre système alimentaire [lire Alimentation, environnement et santé]. Elles vont aussi dans le même sens que plusieurs recommandations formulées par A. MacMillan dans son article publié sur lafaimexpliquee.org en juin dernier [lire Le moment n’est-il pas venu de repenser la gestion de notre alimentation ?] avec la différence peut-être que la NEF n’apporte pas de solution claire à la résolution de la contradiction entre une meilleure rémunération de touts les travailleurs de la filière alimentaire et une alimentation abordable par tous, tout en assurant la reconnaissance de la vraie valeur de notre alimentation. Il y a deux aspects qui ne sont pas suffisamment soulignés dans le rapport de la NEF:


  1. Le premier est l’énorme gaspillage de nourriture et de ressources que cause notre système alimentaire [lire] qui suggère qu’il s’agit de donner une plus grande valeur - financière, mais aussi éthique - à notre nourriture

  2. Le second est l’augmentation de la faim qui a été observée récemment au Royaume Uni [lire]


Bien que le chemin vers le changement devra être déterminé de façon démocratique, on aurait pu s’attendre de la part du rapport de la NEF quelques considérations et de recommandations essentielles dans le domaine des politiques.


Nous ne pouvons que souhaiter que d’autres études, semblables à celle de la NEP pour le Royaume Uni, soient menées dans beaucoup d’autre pays, tout sachant que, très probablement, leur résultat risque aussi d’être très préoccupant, et en espérant que ces travaux aideront à lancer le mouvement que la NEP appelle de ses voeux.



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Pour en savoir davantage :


  1. -New Economics Foundation, Urgent recall: Our food system under review - Summary report, London November 2014 (en anglais)

  2. -New Economics Foundation, Urgent recall: Our food system under review - Complete report, London November 2014 (en anglais)

  3. -A. MacMillan, Le moment n’est-il pas venu de repenser la gestion de notre alimentation ?, lafaimexpliquee.org, juin 2014

  4. -Lafaimexpiquee.org, Alimentation, environnement et santé, décembre 2014

 

Dernière actualisation:    décembre 2014

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