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Dernière actualisation: mai 2013
5 mai 2013
Il est possible d’en finir avec la faim en période de crises
Dans un monde qui produit largement assez de nourriture pour que tout un chacun puisse s’alimenter correctement, il est possible d’éradiquer la faim, à condition de changer fondamentalement notre façon d’approcher la question et d’agir de manière réellement déterminée. C’est ce que disent Ignacio Trueba et Andrew MacMillan dans leur livre «How to end hunger in times of crises» (Comment en finir avec la faim en temps de crises) qu’ils viennent de publier chez FastPrint Publishing.
L’essentiel du message des deux auteurs, qui ont une longue expérience dans le domaine du développement, peut se résumer ainsi :
-Le système alimentaire mondial est en désordre, puisque 1 milliard de personnes ont faim, 2 milliards souffrent de déficiences alimentaires et 1,5 milliards sont en surpoids ou obèses
-Il faut considérer comme deux problèmes différents d’une part la réduction de la faim dans le monde et d’autre part la nécessité d’assurer de façon durable une alimentation suffisante à l’Humanité dans l’avenir
-Dans la mesure où la sous-alimentation est due à l’incapacité des populations concernées d’avoir les moyens d’accéder à suffisamment de nourriture, il s’agit de mettre en place des programmes de transfert de ressources vers ceux qui souffrent de la faim. Ils notent qu’il suffirait de relativement peu de chose, soit à peine 2% de la production alimentaire mondiale, alors que le gaspillage représente 15% de la production dans les pays industrialisés
-Les Etats doivent donner la capacité aux petits producteurs agricoles d’avoir les moyens d’augmenter leur production. Ils doivent mettre en oeuvre des programmes de nutrition, de formation, de santé et d’infrastructure rurale. Ils doivent aussi relancer la recherche agronomique publique en vue de développer des techniques de production agricole durables moins dépendantes de l’utilisation d’intrants achetés
-Au niveau global, il est nécessaire de donner davantage d’autorité, de pouvoir et de moyens aux institutions responsables de la gestion du système alimentaire, pour qu’elles puissent réellement superviser l’éradication de la faim et l’évolution vers un système plus durable de production et de consommation
-Tout un chacun doit réfléchir sur son mode de vie et d’alimentation en vue de le modifier pour le rendre plus compatible avec un développement durable.
Trueba et MacMillan avancent certaines propositions qui ne manqueront pas de faire réagir les tenants de l’orthodoxie économique dominante. Ainsi, ils proposent l’instauration d’une taxe sur les aliments qui ont une forte empreinte écologique, et suggèrent un système de prix qui s’inspire de celui adopté par le commerce équitable, c’est-à-dire qui prenne en compte les coûts réels de production et qui rémunère le travail du producteur de manière à lui assurer un mode de vie décent et lui donner la capacité de faire face aux risques inhérents à l’agriculture.
Ils avancent aussi l’idée de la création d’un Mécanisme global pour diminuer le gaspillage de nourriture et la surconsommation (calqué sur le Mécanisme pour un développement propre) qui pénaliserait les pays qui ne respecteraient pas des objectifs de réduction du gaspillage et de la surconsommation. Les fonds ainsi récoltés serviraient à financer des programmes d’éradication de la faim.
Les auteurs ont certainement le mérite d’apporter plus de clarté dans le débat sur l’alimentation mondiale en faisant la distinction entre la question de la faim aujourd’hui et celle d’assurer l’alimentation de la population mondiale dans l’avenir. Ils ont aussi le mérite de montrer qu’il est possible maintenant d’éradiquer la faim et ils formulent des solutions originales pour financer les programmes sociaux indispensable pour y arriver.
La critique qu’on pourrait cependant leur opposer est qu’ils esquivent un peu trop poliment la question politique en présumant que la volonté politique existe réellement de solutionner le problème de la faim. Or les gouvernements n’ont cessé de s’engager à le faire depuis le premier Sommet Mondial de l’Alimentation organisé par la FAO à Rome en 1996. Mais ce sont là autant d’engagements qui, dans la plupart des cas, ne se sont pas vraiment traduits dans les faits. Pour s’en convaincre, il suffit de constater le nombre très réduit de pays ayant démontré cette volonté mesurée par l’Indice d’engagement contre la faim et pour la nutrition (HANSI) qui vient d’être publié par l’Institute of Development Studies de l’Université de Brighton au Royaume Uni. [lire] Il faut bien l’avouer, la volonté politique dans un pays donné dépend des rapports de force politiques qui y existent, et seule l’organisation des producteurs, notamment des producteurs pauvres, pourra réellement leur donner le poids tant politique qu’économique pour créer les conditions d’une action résolue des gouvernements. Aussi, le livre dit très peu quant à la nécessité de faire respecter les droits des communautés rurales, notamment le droit à la terre, à l’eau, aux ressources génétiques et forestières, à l’heure où celles-ci sont les objets de multiples convoitises.[lire]
Notons que le livre est en vente sur Internet sur le site de FastPrint Publishing et que les recettes qui en seront tirées serviront à financer des programmes d’éducation dans une communauté rurale au Kenya (www.gotmatar.org).
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