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8 février 2015




La Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition s’attaque aux terres et aux semences en Afrique


Un nouveau rapport préparé par l’ONG internationale GRAIN et par AFSA (Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique - Alliance for Food Sovereignty in Africa), intitulé « Remise en cause des lois foncières et semencières : qui tire les ficelles des changements en Afrique ? » documente les actions prises par la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition du G8 dans le domaine du foncier et des semences en Afrique.


Nous avions déjà eu l’occasion, sur lafaimexpliquee.org d’attirer l’attention sur les agissements de cette Nouvelle alliance soutenue par les pays les plus riches du monde, certaines organisations internationales (Commission de l’Union Africaine, Banque mondiale, FIDA, Banque Africaine de développement, Millenium Challenge Corporation, AGRA et IFPRI notamment) et à laquelle prennent part des grandes multinationales de l’agroalimentaire, telles que Syngenta, Yara, MIMRAN, AGCO, la Fondation mondiale pour le Cacao, Monsanto et Mars. Nous avions vu alors que l’Alliance cherchait notamment à favoriser les investissements privé dans le secteur agricole et alimentaire africain tout en imposant des changements de politiques agricole et alimentaire qui pourraient avoir des conséquences considérables pour les paysans africains.




Le rapport GRAIN/AFSA permet à présent de se faire une idée des changements de politiques provoquées par l’Alliance, un peu plus de deux ans après sa création, et montre comment « la bataille fait rage autour du contrôle des ressources en Afrique » notamment la terre, l’eau et les semences :


                  1. travail de délimitation officielle des exploitations agricoles, de leur enregistrement et de la délivrance de titres de propriété et mise en place d’une législation permettant l’émergence d’un marché des terres et de la location des terre

                  2. création d’un catalogue officiel des semences, sur le modèle de ceux existant dans les pays riches - et notamment en France -, et dans lequel une semence doit être inscrite avant qu’elle ne puisse être commercialisée en toute légalité

                  3. introduction de droits de propriété intellectuelle sur les variétés végétales.


Toutes ces mesures, souvent introduites sous le prétexte de protéger les petits producteurs, servent en fait à ouvrir des brèches dans le système traditionnel coutumier de gestion pour faciliter la pénétration des intérêts privés et les asseoir légalement. Ainsi, la délivrance de titres de propriété fait sortir de facto la parcelle de terre concernée du système coutumier de gestion collective des terres et donne la possibilité à un individu de négocier la vente ou la location de cette terre en-dehors de tout contrôle communautaire à des éléments externes à la communauté, ce qui contribue de façon évidente à miner la communauté et ses droits ancestraux. De même, l’introduction de la nouvelle réglementation sur les semences interdit les ventes informelles de semences et menace de sanctions financières les producteurs qui voudraient réutiliser une partie de leur récolte comme semence.


D’après le rapport GRAIN/AFSA, les mesures suivantes ont d’ores et déjà été prises dans les dix pays qui ont signé un accord avec la Nouvelle alliance :





Il donne aussi toute une série d’indications précises et détaillées sur le rôle et les intérêts particuliers des différents membres de l’Alliance, ainsi que sur le contenu de différentes mesures de politiques prises par les pays africains concernés.


Ce rapport constitue une lecture indispensable pour qui veut savoir comment les pays riches alliés aux grandes multinationales sont en train de tailler en pièce l’Afrique à leur profit et au détriment de la paysannerie locale.


A titre d’exemple concret de ce qui ce passe en Afrique, il est bon de mentionner ici le cas de l’État de Taraba, à l’Ouest du Nigeria (près de frontière camerounaise) où des paysans sont menacés d’éviction par les autorités qui veulent donner 30.000 hectares de rizière à la succursale kényane de la compagnie américaine Dominion Farms. Ce projet est soutenu par la Nouvelle alliance ! Les terres font partie d’un projet public d’irrigation et font vivre des milliers de familles. Comme toujours dans ces cas, l’État justifie l’opération par ‘l’augmentation de la production qui contribuera à la sécurité alimentaire du pays’, en omettant soigneusement de parler des conséquences dramatiques qu’aura ce projet pour des dizaines de milliers de ruraux vivant dans la zone concernée. Aussi, il s’avère une fois de plus dans ce cas comme dans beaucoup d’autres du même genre, que la ‘consultation de la population’ s’est limitée à la consultation des élites locales et non de la masse des petits paysans…


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Pour en savoir davantage :


  1. -Remise en cause des lois foncières et semencières : qui tire les ficelles des changements en Afrique ? GRAIN, janvier 2015

  2. -Dominion Farms accapare des terres au Nigeria, GRAIN, janvier 2015

  3. -La Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition : un coup pour les capitaux internationaux ? par N. McKeon, lafaimexpliquee.org 2014

  4. -Une première analyse de la mise en oeuvre de la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition du G8 confirme les craintes que l’on pouvait avoir, lafaimexpliquee.org 2013

  5. -L’offensive du «capitalisme éclairé» se poursuit en Afrique, lafaimexpliquee.org 2013

 

Dernière actualisation:    février 2015

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